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Le cycle du marché haussier est-il terminé?

Publié le 03-16-2020

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Coronavirus et chocs pétroliers

 

Le 6 mars, la Russie a surpris les marchés en refusant la diminution de la production soutenue par tous les autres pays de l’OPEP+ et jugée nécessaire pour stabiliser les prix du pétrole en raison de la chute de la demande mondiale liée au coronavirus. L’Arabie saoudite a répondu au cours de la fin de semaine en annonçant une augmentation réelle de la production de pétrole. Cela fait suite à l’annonce par l’Italie de la fermeture complète du pays.

Comment les marchés ont-ils réagi?

Les marchés ont poursuivi le repli lié au coronavirus amorcé au cours des dernières semaines. Les cours boursiers mondiaux ont continué de chuter, tout comme les taux des titres d’État souverains. La baisse des prix du pétrole, provoquée par l’anticipation d’une diminution de la demande en raison de la propagation du coronavirus, s’est accentuée. Puis le 8 mars le taux des bons du Trésor à 10 ans a chuté à 0,318 %.1 Nous croyons que tout cela va fort probablement infliger de nouveaux chocs à l’économie mondiale et aux marchés financiers, y compris une autre baisse marquée des prix du pétrole, des inquiétudes du public concernant la propagation du coronavirus et d’autres épisodes d’agitation des marchés mondiaux.

À quoi les investisseurs peuvent-ils s’attendre de la guerre des prix en Arabie saoudite?
L’Arabie saoudite semble avoir plusieurs objectifs en vue, notamment nuire aux producteurs américains de pétrole de schiste et amoindrir le rôle et le poids de la Russie, l’un des principaux producteurs et exportateurs mondiaux de pétrole, sur le marché du pétrole et au sein de l’OPEP +. L’Arabie saoudite est davantage en mesure de tolérer une baisse des prix du pétrole à titre de premier producteur exerçant un contrôle sur la production de pétrole du pays via la société d’État Saudi Aramco. (De son côté, la Russie compte de nombreux producteurs de pétrole principalement privés et Rosneft, grande société pétrolière appartenant en grande partie à l’État.) Par conséquent, en principe, l’Arabie saoudite pourrait être en mesure de résister à une baisse des prix du pétrole plus longue que la Russie ou les entreprises privées américaines.

Nous entrevoyons cinq retombées potentielles d’une forte baisse des prix du pétrole.

1. Une baisse des prix du pétrole entraînerait probablement une baisse des cours des actions des sociétés pétrolières, gazières, chimiques et commerciales.

2. Les économies des marchés émergents producteurs de pétrole sont susceptibles d’être durement touchées, ce qui pourrait soulever des inquiétudes quant à leur déficit budgétaire, leur balance des paiements et leur dette extérieure et, par conséquent, mener à la dépréciation de leur devise. En outre, nous nous attendons à un coup dur pour les sociétés de services aux collectivités dont les tarifs sont liés aux prix de gros de l’énergie, ainsi que pour les banques qui prêtent beaucoup aux sociétés de production d’énergie.

3. Le pétrole serait moins cher pour les pays importateurs et les consommateurs.

4. L’Arabie saoudite et d’autres grands producteurs (y compris la Russie, les producteurs américains de pétrole de schiste et d’autres membres de l’OPEP+) en souffriraient.

5. Les conditions financières se resserreraient probablement de manière significative, en particulier pour les producteurs à coût élevé et pour ceux qui ont des besoins importants de refinancement ou de financement d’investissements. (Cela inclut les producteurs américains de pétrole de schiste et les grandes compagnies pétrolières appartenant à l’État, comme Pemex.) Les écarts de taux des titres de ces secteurs et des titres d’État souverains vont probablement s’élargir, peut-être même considérablement.

Surveillance des effets persistants du coronavirus

Outre la turbulence des prix du pétrole, la flambée du nombre de cas d’infection à coronavirus dans le monde continue de faire des ravages sur les marchés. Tandis que le virus se propage aux quatre coins de l’Europe continentale et que les pays mettent en œuvre des mesures de santé publique extrêmes, nous nous attendons à une détérioration de la confiance du public et à une diminution des dépenses discrétionnaires des consommateurs et des entreprises.

Le cas de l’Italie se démarque parce qu’à l’instar de la Corée du Sud, le pays a testé énormément de gens et le nombre de cas et de décès a considérablement augmenté.

Les gouvernements d’autres pays se sont surtout affairés à préconiser la « distanciation sociale », les mesures d’hygiène et les restrictions sur les voyages internationaux pour tenter de ralentir la propagation du virus. Par conséquent, on peut s’attendre à ce que les gouvernements mondiaux et le public surveillent attentivement la réaction du public en Italie et l’efficacité de ces mesures.

Le cycle actuel du marché est-il finalement menacé?

Rappelons que nous affirmons depuis des années que le cycle économique et boursier actuel se révélera non seulement plus long que jamais, mais qu’il se prolongera pendant beaucoup plus longtemps que ce à quoi la plupart des gens s’attendaient. Même si le cycle dure depuis très longtemps, les caractéristiques fondamentales du marché des titres de créance sont excellentes. Le taux de croissance global du crédit n’a jamais été aussi bas aux États-Unis, les banques étaient bien capitalisées et les entreprises américaines avaient profité de la conjoncture pour emprunter à des taux plus bas que jamais et repoussé les échéances très loin dans l’avenir. Par conséquent, une récession ne semblait pas envisageable, à moins d’une grave erreur de politique monétaire quelque part dans le monde ou d’un choc exogène imprévu sur l’activité économique.

Hélas, le coronavirus et les perturbations des marchés pétroliers pourraient être les chocs exogènes qui mettront fin à ce cycle prolongé. La croissance mondiale était déjà dans un état précaire par suite du ralentissement de l’activité économique découlant de l’incertitude provoquée par la guerre commerciale en 2019. Les perturbations de l’activité économique liées au coronavirus surviennent à un moment inopportun. Le problème est aggravé par l’offre de pétrole qui inonde les marchés. Les prix du pétrole plongent, signe inquiétant pour les dépenses d’investissement des entreprises américaines et mauvais présage pour le marché américain des obligations de qualité inférieure, qui est fortement composé de sociétés énergétiques américaines.

Les voyants de notre tableau de bord de fin de cycle clignotent parce que les taux d’intérêt à long terme chutent, la courbe des taux s’aplatit de manière significative, les prix de l’énergie s’effondrent et les écarts de taux en faveur des titres à rendement élevé augmentent considérablement. Tout cela est assez préoccupant et nous allons suivre de près l’évolution de la situation.

Peut-on s’attendre à ce que d’autres mesures de relance monétaire soient adoptées?

Les deux coups durs que sont l’épidémie de coronavirus et l’inondation d’offre de pétrole (et les pressions qu’ils exercent sur les producteurs de pétrole) ont provoqué une énorme réaction sur les marchés des actions, des titres à revenu fixe, des devises et du pétrole. De toute évidence, les marchés réagissent à la peur d’une récession mondiale.

Nous entrevoyons une détérioration marquée des statistiques et la persistance de la conjoncture d’extrême « aversion pour le risque » qui pousse les investisseurs à se tourner vers des catégories d’actifs comme les bons du Trésor américain, le yen et l’or, dans un contexte de recrudescence de volatilité. À moins de la possibilité d’une instabilité du système financier et en supposant une intervention monétaire et budgétaire appropriée, nous pourrions nous rapprocher d’un creux.

La contagion du coronavirus pourrait se résorber relativement rapidement, mais il semble peu probable que ce soit le cas pour le choc de l’offre de pétrole. La situation de 2014 à 2015 pourrait bien nous servir de référence historique récente; à l’époque, l’Arabie saoudite a augmenté sa production pour faire baisser les prix du pétrole afin de mettre en échec les producteurs américains de pétrole de schiste et de miner l’influence russe et iranienne au Moyen-Orient et sur le marché du pétrole. À ce moment-là, la demande mondiale était également faible, car la Chine avait souffert de la vigueur du dollar après la crise du « taper tantrum » (réaction de panique provoquée par le retrait des mesures d’assouplissement quantitatif). Il a fallu plusieurs mois de diplomatie pour que la situation s’améliore. Cela étant dit, la phase d’expansion des États-Unis était à un stade plus précoce et la Chine était prête à s’engager dans un vaste plan de relance budgétaire, monétaire et, surtout, du crédit pour accélérer l’économie intérieure.

Aujourd’hui, en revanche, les phases d’expansion mondiale et américaine sont plus avancées; les chocs de croissance mondiale sont moins susceptibles de réagir aux mesures de relance, en particulier à l’assouplissement de la politique monétaire (parce que les perturbations des chaînes d’approvisionnement ou les décisions d’éviter les dépenses discrétionnaires pour des raisons de santé et de sécurité ne répondront probablement pas directement à ces stimuli), et le risque de restriction des flux de trésorerie pourrait accroître les probabilités d’un déclenchement d’une vague de défaillances d’entreprises lourdement endettées (y compris des producteurs américains de pétrole de schiste).

De plus, une autre forte baisse des prix du pétrole, dans un contexte de craintes d’un ralentissement de la croissance mondiale et d’une diminution généralisée de la demande finale, devrait faire baisser le taux d’inflation sommaire et les anticipations d’inflation. Cela va probablement entraîner une compression accrue des taux obligataires, une réduction des « primes de terme » (rendement excédentaire normalement requis pour détenir des obligations à long terme plutôt que de renouveler des obligations à court terme) et des escomptes liés à l’anticipation d’autres baisses de taux.

Jusqu’à la première semaine de mars, on pouvait très bien justifier que la Réserve fédérale américaine (Fed) et les autres grandes banques centrales n’interviennent pas et attendent de voir comment l’économie mondiale se porterait et si les efforts pour contenir le coronavirus porteraient leurs fruits. Maintenant, toutefois, si les courbes continuent de s’inverser (et surtout si les conditions financières continuent de se resserrer), les probabilités que la Fed valide les escomptes liés à l’anticipation d’autres baisses de taux et ait recours à d’autres mesures d’assouplissement quantitatif si nécessaire vont augmenter considérablement. Il est de plus en plus probable que les banques centrales envisagent de recourir à une politique monétaire encore plus expérimentale, comme le largage de liquidités par hélicoptère, surtout si le soutien budgétaire ne se concrétise pas.

En réalité, les baisses de taux seront très peu efficaces à ce stade-ci; ce qu’il faut surtout, c’est injecter des liquidités. Nous ajouterions à cette liste l’adoption de mesures de relance budgétaire.

Un soutien budgétaire aux petites et moyennes entreprises et aux autres secteurs touchés a été annoncé dans plusieurs pays; il faudra voir si la situation se stabilise ou se détériore. De plus, il faudra surveiller attentivement la situation en Italie pour voir comment le gouvernement s’en tire avec ses mesures de relance budgétaire et comment l’UE et la zone euro décident de procéder. (Les écarts de taux des titres d’État souverains de l’Italie ont été volatils et se sont initialement élargis lorsque les premières craintes liées au coronavirus sont apparues ces dernières semaines.)

Des mesures de relance budgétaire à grande échelle pourraient s’avérer nécessaires; le ralentissement de l’activité pourrait perdurer et nous pourrions assister à une reprise plus graduelle que la reprise en V tant espérée dans le monde entier. La reprise semble déjà se profiler en Chine. De nombreux pays n’ont pas les capacités de traitement et d’hospitalisation (ou la capacité de mobiliser des ressources) dont dispose la Chine. Par conséquent, l’auto-quarantaine et les restrictions des dépenses discrétionnaires pourraient entraîner un ralentissement plus progressif et prolongé. Nous craignons que les investisseurs doutent que les pays adopteront les mesures de relance nécessaires. Rappelons que le Congrès américain a approuvé de justesse le financement du Troubled Asset Relief Program pendant la crise financière mondiale et que les dirigeants des banques centrales ont déploré ces dernières années que de nombreux gouvernements n’ont pas adopté des mesures de relance budgétaire appropriées.

Résumé de la situation

En conclusion, il importe de noter que les caractéristiques fondamentales du cycle en cours étaient solides, mais que le coronavirus est un événement exogène inattendu qui pourrait venir perturber considérablement l’activité économique.

La situation du marché peut-elle empirer? Très certainement, en particulier compte tenu de la panique qui règne en ce moment (sur les marchés et dans la population générale en réaction au flux grandissant de manchettes à sensation et au manque de confiance que les gouvernements vont mettre en place des mesures de relance politiques appropriées). À quel point la situation va-t-elle se détériorer? Notre scénario de la pire éventualité laisse présager une récession mondiale, mais ce scénario nous semble relativement peu probable.

Nous croyons que nous saurons que le creux est proche en nous fiant aux statistiques sur le virus, pas aux statistiques économiques, plus précisément, lorsque nous observerons un pic suivi d’une baisse évidente du nombre quotidien de cas et de décès en dehors de la Chine.

Enfin, nous tenons à réitérer que nous allons nous en remettre. Les actions se négocient à très bon marché par rapport aux obligations et chaque jour qui passe, de nouvelles occasions de placement émergent. La chute des prix du pétrole et la baisse des taux d’intérêt soutiendront la consommation en temps voulu. Éventuellement, lorsque nous analyserons la situation en rétrospective, nous verrons que ce n’était qu’une récession dans un marché haussier prolongé.

Renseignements importants

1. Source : CNBC, 9 mars 2020

Rédigé en collaboration avec Arnab Das (stratège des marchés mondiaux, EMOA), Paul Jackson (chef de la recherche mondiale sur la répartition de l’actif), Tomo Kinoshita (stratège des marchés mondiaux, Japon) et David Chao (stratège des marchés mondiaux, Asie-Pacifique)

L’écart de taux est la différence entre les bons du Trésor et les autres titres de créance qui sont identiques à tous les égards, sauf pour la cote de solvabilité.

Une courbe des échéances, ou des taux, fait référence à l’écart de taux entre les obligations à très court terme et les obligations à long terme.

Le largage de liquidités par hélicoptère est une politique monétaire proposée encore plus expérimentale que l’assouplissement quantitatif. Le concept qui sous-tend le largage de liquidités par hélicoptère est que les banques centrales injectent directement de l’argent dans l’économie pour faire grimper le taux d’inflation.

Kristina Hooper est stratège des marchés mondiaux à Invesco. Cet article est paru initialement sur le blogue Invesco.

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Disclaimer

© 2020 par Invesco Canada Ltée. Reproduit avec permission.

Les opinions exprimées ci-dessus sont celles des auteurs au 9 mars 2020. Ces commentaires ne doivent pas être interprétés comme des recommandations, mais comme une illustration des grands thèmes. Les énoncés prospectifs ne sont pas garants du rendement futur. Ils comportent des risques et des incertitudes et sont fondés sur des hypothèses; nous ne pouvons pas vous garantir que les résultats réels ne différeront pas considérablement de nos attentes.

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